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Ma Yougoslavie !

20 juillet 2005

Ma Yougoslavie !

Voici quelques pensées et articles publiés au sein de notre association Kalamares. Ils intéresseront les amoureux de la région des Balkans, mais aussi ceux avides de découverte. En espérant que vos lectures soient agréables, et n'hésitez surtout pas à me faire partager vos divers avis, remarques,  et opinions. Aucunement, je n'essaie de prendre un quelconque parti, je souhaite simplement faire part de ce que j'aime, de ce qui me préoccupe pour l'avenir des Balkans, et me refuse à me perdre dans des réparations de conflits sans intérêts. Vous trouverez en ces lieux également quelques photos prises lors de divers voyages.

Bonne lecture, et à bientôt !

Les Balkans à vos balcons, pour mémoire et volonté de changer !!!

Connaissez vous la région des Balkans ?

Saviez vous que le mot " Balkan " signifie " montagne " en turc ? Balkans…Balkans…il raisonne souvent dans nos esprits la guerre, sale comme toute guerre, le nationalisme, atavique, et sa doctrine meurtrière, qui n’exerce pas seulement ses ravages dans cette partie de l’Europe. Ils sont représentés par les cinq états européens qui se sont affranchis entre 1800 et 1913 de la domination turque : Albanie, Bulgarie, Grèce et les cinq fédérations issues de l’éclatement de l’ancienne Yougoslavie, c’est à dire la Slovénie, la Croatie, la Bosnie Herzégovine, la Serbie comprenant le Kosovo, et la Macédoine. Egalement s’imbrique la Hongrie, mais sous une autre forme. Il est bien sûr facile de donner des leçons, de déplorer l’archaïsme de cette région de vallées âpres et de haines recuites. Appuyé sur l’identité, sur la mémoire, sur ce que chacun a de plus intime, les souvenirs d’enfance, la religion des pères, les paysages et la jeunesse, les chants de l’enthousiasme et les émois littéraires, le culte de la nation parle à quiconque a conscience du temps et des origines, c’est à dire à tous. Parlant au cœur et non à la raison, le nationalisme est l’âme des pays souffrants, il est l’opium politique des peuples. Les Balkans ont littéralement explosé sous nos yeux écarquillés , essayant dans l’urgence de diagnostiquer le mal, de décrire ses racines. Puisque encore aujourd’hui se décide l ‘avenir de l’Europe, anticipons l’évolution du nationalisme et décourageons le. A peine en est elle à ses prémisses que se pose la question de l’intégration des pays de l’est. Les connaissons nous au delà de ce que les " mammouth-médias " nous font partager ? C’est parce que l’Europe de demain ne reste possible qu’avec les Balkans, parce qu’il est grand temps d’entamer le processus de reconstruction des pays l’ex Yougoslavie, qu’il est essentiel d’accroître les échanges avec ces pays.

Sarajevo, capitale bosniaque du fast-food

Et vous allez encore au Mac Do ou au Quick ? S’il est bien une chose qui puisse unir les habitants de l’ex Yougoslavie, c’est bien les " cevapi " (prononcer " tchevapi "). Ces appétissantes boulettes de bœuf sont une passion nationale. La recette de base des cevapi est très simple. Il suffit de façonner des bâtonnets de viande hâchée et de les faire griller. N’en déplaise aux habitants de Banja Luka, Travnik, de Skopje, ou d’Istanbul, c’est à Sarajevo que revient la palme.

La préparation en continu est une condition de base pour faire de bons cevapi : la viande hâchée doit reposer au frais pendant la nuit, le gril doit être toujours à la même température, et le soumoun, le petit pain plat et rond dans lequel sont servis les cevapi se réchauffer doucement à la vapeur. Sensation unique, les cevapi ! Il en existe de formes différentes selon les régions que vous visitez. Mais quel que soit l’endroit, la couleur et l’odeur y sont si alléchantes qu’on a toujours envie d’en manger une dizaine. A Sarajevo, les " cevabdzinice " se transmettent en famille, et dans leurs décors orientaux, accompagnés du sourire et de la gentillesse du personnel, vous pouvez découvrir une saveur ancestrale.

Allez, je vous donne la recette :

ingrédients pour 6/8 personnes : 500 g de poitrine de veau, 250 g de bœuf, 250 g d’agneau, 3 oignons émincés, un peu d’eau minérale gazeuse, sel, poivre.

Préparation : Hacher et mélanger la viande, ajouter les oignons émincés, saler, poivrer. Lier le mélange à l’eau minérale et laisser reposer au frais pendant la nuit. Le lendemain, former des boulettes allongées de la taille d’un gros doigt (5 à 7 cm de longueur et 2 à 3 cm de diamètre). Faire griller au feu de bois (la grille du barbecue doit être chaude). Servir entre deux tranches de soumoun.

Pourquoi je suis parti dans les Balkans.

Davor me demande de faire le récit de mes voyages à travers les pays de l’ex-Yougoslavie. Une demi-douzaine de pays et 5 semaines de souvenirs en quelques mots, la tâche est ardue, mais voici tout de même un début.

Par où commencer l’histoire d’un voyage sinon par une tentative de réponse à la question qui venait aux lèvres de la quasi-totalité des gens que je rencontrais dans ces pays ? Ces pays. Pluriel. Je prends là acte de ma culpabilité simplificatrice à désigner cet ensemble de réalités par le vocable unique de Yougoslavie, vocable commode certes, mais cachant une diversité complexe que le bon sens m’interdit d’évoquer en aussi peu de lignes.

" Alors, pourquoi la Yougoslavie ? " me demandaient-ils avec insistance. Bien désemparé, je bredouillais en pensant que ma première rencontre avec ces terres s’était faite par le biais de la presse, dans la situation désastreuse que chacun sait, au moment de cette guerre fratricide. Mais peut-on dire que l’on a vraiment rencontré un pays sans en avoir jamais rencontré aucun habitant ? Je ne pense pas, jugez plutôt : la première image que je retiendrai est celle d’une Croate et d’un Serbe dansant ensemble, devisant gaiement, passant somme toute un excellent moment. Cette scène a priori anodine a pourtant de quoi surprendre quand les médias n’avaient jamais laissé filtré pendant toutes ces années de guerre que les massacres et les blessures ouvertes. Que ces deux-là puissent non seulement parler à peu près la même langue, mais de surcroît passer du bon temps ensemble était au delà de mon imagination formatée à l’occidentale.

Pour ma part, ceci suffit à déclencher en moi une avalanche de curiosité : curiosité pour ces belles langues slaves, curiosité pour ces paysages magnifiques qui commençaient à être placardés de ci de là, curiosité de rencontrer ces gens mystérieux et attachants, curiosité enfin d’aller découvrir par moi-même toutes les beautés dont les journaux n’avaient jamais parlé. Et je ne fus pas déçu, loin de là. Je découvrais une richesse culturelle et historique inouïe, des paysages à couper le souffle, une joie partout de chacun à continuer à croquer la vie à pleines dents, et surtout, surtout, des gens d’une chaleur peu commune, des gens dont le sens de l’hospitalité vous fait réaliser à quel point cette notion nous fait défaut. Autant de découvertes qui font qu’à cette question maintenant je réponds : " pourquoi la Yougoslavie ? Hé bien, voyez-vous, c’est comme le chocolat… " Et je n’ai généralement pas besoin de continuer ma phrase, mes interlocuteurs comprenant très vite que le simple fait d’avoir goûté à ce pays – et ils sont visiblement flattés que je l’associe aux délices du chocolat - me donne la gourmandise d’en découvrir plus encore. Et vous ? Un petit carré, ça vous tente ?

Article d’Emmanuel , rencontré en août 2003 dans la fameuse rue Skadarlija à Belgrade, autour d’une bonne bière de Niksic

Eau potable et environnement en Bosnie. 

La Bosnie-Herzégovine a de grandes pénuries d’eau. La ville n’est pas encore touchée, mais les campagnes le sont avec gravité déconcertante. Que dire d’un pays dans lequel l’eau est une denrée rare. J’ai attendu une heure aujourd’hui pour remplir deux bidons de vingt litres chacun et une bouteille, très peu disponible en campagne. Je suis arrivé à cette source d’eau potable, en plein forêt, et en milieu de matinée une foule s’y concentrait déja. Un homme remplissait ses bidons de cette eau fraîche alors que je prenais conscience en moi de cette chance incalculable que j’avais en France de pouvoir ouvrir le robinet sans souci, et d’obtenir une pression inavouable. " L’eau de cette source aussi, ils vont la privatiser, et nous on en mourra ! " me dit il, avec un visage lassé. Il me parle de ses voyages à Paris, de son amour pour la campagne, il est en sueur, moi également, il s’en va en me saluant. Je remplis mes récipients, je reste pensif.

Dans toute la Bosnie-Herzégovine, les belles prairies d’autrefois, les rivières et les collines sont aujourd’hui couvertes de dépôts illégaux d’ordures que les autorités ont le plus grand mal à nettoyer. Les écologistes expliquent que les sites de dépôts sauvages des déchets ont déjà pollué les ressources souterraines en eau. Une législation pour la protection de l’environnement et de la nature et la gestion du traitement des ordures a été adoptée en Republika Srpska l’an dernier, mais sa mise en application est loin d’être appliquée. Les nappesphréatiques son considérablement polluées, et selon le militant écologiste M. Omanovic, environ 35 tonnes de médicaments sont entrés dans le pays pendant la guerre, mais seulement 8% ont été utilisés en toute sécurité dans les hôpitaux, le restant étant déjà périmé et jeté aux ordures. Enorme problème d’éducation quant à l’environnement, les ordures finissent souvent dans les rivières et les champs, et malgré les aides gouvernementales des entités et de l’état, de la Commission Européenne et de la Banque Mondiale, les citoyens de Bosnie doivent apporter leur contribution, en commençant par ne plus jeter leurs ordures devant leurs maisons, ou de les brûler dans les champs.

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Produite de 1955 à 1985, cette petite auto rigolote est issue d’un projet sur plan de la fameuse Fiat 500, communément appelée " cacahuète ", non retenu par la firme italienne, et revendu à la firme automobile yougoslave Zastava. En somme, la deuche yougoslave !


La dislocation de l'ancienne Yougoslavie a entraîné celle de sa langue, le serbo-croate. Le bosniaque, le croate et le serbe sont des symboles nouveaux pour des identités nouvelles.

Langue morte ou vivante ?

Dans la perspective volontariste d'affirmer son existence, chaque Etat issu de la Yougoslavie socialiste nomme à présent sa propre langue. Telle est la logique de tout pays souverain. C'est dans ce processus que les langues bosniaque, croate, serbe ou monténégrine sont devenues des instruments réels d'identification nationale. La langue est le symbole de la culture, de l'identité. Avec derrière elle une longue tradition d'écriture, la langue est le reflet de l'histoire. Aujourd'hui, la Serbie parle le serbe, la Croatie le croate, la Bosnie-Herzégovine trois langues : le bosniaque, le serbe (en " République serbe ") et le croate (en " Herceg-Bosna ").

Tout citoyen de ces espaces peut donc à l'heure actuelle se définir comme polyglotte.

Une langue, puis deux, puis trois, puis quatre?

Les ressemblances entre les trois langues sont pourtant bien plus nombreuses que les différences. C'est pourquoi au sens linguistique, on peut dire que le serbo-

croate est UNE langue. L'écriture cyrillique des Serbes et des Monténégrins reste certes difficile pour les Croates qui

presque parfaite à l'oral.Lors des " Accords de Novi Sad " de 1954, le serbo-croate était établi en tant que langue unique avec deux prononciations. Les textes officiels de l'ancienne Yougoslavie étaient donc tous écrits en serbo-croate. Il n'en demeure pas moins que chaque République avait son dialecte régional, sa spécificité linguistique qui tendra au fil des années à devenir spécificité symbolique d'identités différentes.

En 1967, était publiée par les chaires universitaires croates la "Déclaration sur le nom et la situation de la langue littéraire", qui revendiquait la publication des textes émanant des organes fédéraux dans LES QUATRE LANGUES littéraires des peuples yougoslaves: serbe, croate, slovène et macédonienne. Le sentiment d'appartenance à travers la langue se dessinait déjà. Quand le nationalisme gagne la langue, celle-ci passe d'un moyen de communication à un instrument d'identification, voire un instrument de division. Car en traitant des langues, on traite des gens qui les parlent.

utilisent l'alphabet latin, mais l'intercompréhension demeure encore

Où est ma Bosnie ?

Comme si j’arrivais dans un autre monde, comme si tout d’un coup j’étais basculé sur une autre planète, d’un autre univers. Pourtant, j’y ai passé les étés entiers de mon enfance, et j’ai préparé les voyages longtemps à l’avance, avec impatience.

Du communisme de Tito, de ce communisme où il n’était guère bon portait verbalement atteinte à la personne à la poigne de fer qu’était à l’époque ce Josip Broz Tito, la Bosnie Herzégovine est aujourd’hui devenue l’appendice de toute l’ancienne Yougoslavie. De ce communisme strident, elle est passée sans transition dans le capitalisme à l’américaine, où l’argent compte avant toute chose, même dans l’amour. Elle souhaitait suivre l’exemple occidental, elle l’a fait, et tout ce dont l’homme rêve, un jour l’homme le réalise, disait Jules Verne. Même les pires des exactions, il les réalise. Que dire. Quoi penser. Pleurer ne suffit pas, peut être à soulager certaines âmes, certains chagrins, certaines nostalgies. C’est tout.

A la frontière croato bosniaque, incommensurable est le nombre de véhicules immatriculés en Suisse, en Autriche et Allemagne, dans leur grande majorité. Françaises aussi les plaques, belges, suédoises, italiennes, néerlandaises, et à ma grande surprise cette année espagnoles, luxembourgeoises et même anglaises. Oh que ce pays est triste si toute son âme s’en va pour revenir avec de belles voitures de sport, que ce pays est triste si tout un chacun doit partir pour avoir la capacité d’acheter son réfrigérateur à des milliers de kilomètres. Que ce pays est triste si les jeunes filles doivent avant toute chose et malgré elles mêmes se marier pour un intérêt avant tout financier. Oh que ce pays est triste sans eau, est ce que cette situation nous attend aussi ? La ville n’est pas encore touchée, mais les campagnes le sont avec gravité déconcertante. Que dire d’un pays dans lequel l’eau est une denrée rare. J’ai attendu une heure aujourd’hui pour remplir deux bidons de vingt litres chacun et une bouteille. Je suis arrivé avec ma voiture, j’ai semblé aux yeux d’un homme être pressé, je lui ai dit, peut être pour me rassurer de mon stress occidental que je ne l’étais pas, il m’a rétorqué que je ne semble pas ne pas l’être. Il remplissait ses bidons de cette eau fraîche alors que je prenais conscience en moi de cette chance incalculable que j’avais de pouvoir ouvrir le robinet sans souci, et d’obtenir une pression inavouable. Il me parle de ses voyages à Paris, de son amour pour la campagne, il est en sueur, moi également, il s’en va en me saluant. Je remplis mes récipients, je reste pensif.

L’emblème d’un pays !

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Ma Yougoslavie !
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